mardi 18 février 2014

Carnaval : Le thème des relations haitiano-dominicaines dans les meringues 2014

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Carnaval 2014 - Logo
Plusieurs groupes musicaux haïtiens abordent le thème des relations entre Haïti et la République Dominicaine dans leurs productions à l’occasion des festivités carnavalesques 2014.

D’un simple slogan à un refrain en passant par quelques phrases, les artistes prennent position, expriment leur rancœur face à l’évolution des rapports entre les deux pays, marqués par des abus divers de la part de la République Dominicaine.

N’empêche que certaines de ces formations musicales ont comme sponsors des produits dominicains.

Après les Cayes (Sud), Cap-Haitien (Nord), c’est le tour de la ville des Gonaïves (Artibonite) d’accueillir, du 2 au 4 mars 2014, couleurs, sons, lumières, déhanchements et tout ce qui va avec de pareilles festivités.

« Tèt Kole pou Ayti Djanm » (l’unité pour le renforcement d’Haiti) est le thème retenu cette année.


Postures nationalistes, patriotiques

Le groupe Vwadèzil (Voix des Iles) est l’un des rares –parmi ceux écoutés par AlterPresse- ayant accordé beaucoup plus de place à la question haitiano-dominicaine dans sa meringue titrée « N ap koupe yo fache (rompre le lien d’amitié) ».

Critiquant un racisme anti-noir des Dominicains, cette méringue, par une stratégie discursive de valorisation met en exergue les apports d’Haïti dans les luttes pour la liberté et le respect des peuples.

Vwadèzil chante sans ambages que « nous sommes l’oxygène de la race noire (sic) ».

Un argument justifiant la position d’Haïti contre la sentence 168-13 de la Cour constitutionnelle dominicaine « dénationalisant » des milliers de Dominicains et de Dominicaines d’ascendance étrangère en majorité haïtienne.

Vwadèzil aboutit à l’affirmation que « nous [Haïti] avons rompu les liens avec les préjugés… ».

La formation musicale du genre Compas, Djakout #1, résume en quelques notes sa position sur la question en soutenant que « la République Dominicaine sombre dans la folie de vouloir rabaisser Haïti. Cela ne passera pas ».

Le Groupe de roots, rock, reggae, Brother’s Posse, met les autorités dominicaines en garde contre toute velléité de profiter de la situation malheureuse d’Haïti.

« je ne céderai pas face à la République Dominicaine. La lutte continue », lance-t-il.


Une certaine violence réactionnelle

Les réactions positionnelles de certains sont empreintes d’une sorte de violence s’expliquant, peut-être, par une émotion mal contenue devant les massacres, les assassinats et les lynchages d’Haïtiens en territoire dominicain.

Le groupe Dola Mizik sort un titre évocateur : « Guêpe panyòl », allusion au méchant insecte, mais aussi à la République dominicaine, communément appelée « nan panyòl ».

« Quand je [en réalité un je-nous identifiant les Haïtiens] suis en colère, je ne rigole pas…(…), je te mangerai, je te dévorerai », avertit la chanson.

Le très populaire Dj Tony Mix va même jusqu’à un appel à la violence, promettant le lynchage aux Dominicains « qui veulent nous jouer des tours ».


Le praxème « Tigre » pour identifier l’autre dominicain

Dans certaines productions pour parler de l’autre dominicain, les groupes utilisent « Tigere ». On le retrouve chez Djakout #1. Vwadèzil en fait large utilisation.

Les récits des commerçantes haïtiennes font souvent référence aux « Tigre » comme des voleurs dominicains et d’autres fonctionnaires qui leur soutirent de l’argent au cours des voyages en territoire voisin.

Les témoignages d’Haïtiens et d’Haïtiennes victimes sont légions. Mais peut-on en faire une caractéristique de la dominicanité ?

Doit-on adopter une attitude pareille à celle des « élites dominicano-racistes-nazistes » qui attisent l’anti-haitianisme en république voisine ? Le terme est du groupe à tendance racine, Boukman Ekspéryans, dans sa méringue 2014.


Dénonciation

Quelques groupes dénoncent l’attitude des autorités haïtiennes dans la gestion des relations avec la République dominicaine.

La jeune formation rap « Zoe Money » de Port-au-Prince estime que « le gouvernement dort alors que les Dominicains lynchent les Haïtiens, qu’ils considèrent comme des chiots ».

Brother’s posse ironise le dialogue entre les gouvernements haïtiens et dominicains alors que « le peuple qui souffre est tenu hors des tables de pourparlers ».

Zatrap, pour sa part, dénonce « la misère » qui met Haiti dans un rapport de forces inférieur à son voisin de l’est.


Démagogie ?

Paradoxe, cependant, dans le cas de groupes comme Djakout #1, qui, tout en critiquant la République dominicaine, fait la promotion d’un produit dominicain en tant que son sponsor principal. De surcroît, l’artiste figure de marque de ce produit est invité sur cette méringue.

En polémique avec Djakout depuis près de 15 ans, le groupe Compas T-Vice réplique en évoquant l’hypocrisie des musiciens rivaux. Simple opportunisme polémique ou endossement de la campagne du Collectif 4 décembre appelant au boycott des produits dominicains ?

Pareil pour Tony Mix qui appelle au lynchage de Dominicains alors que l’un de ses sponsors n’est autre qu’une marque dominicaine.

Comme quoi, l’argent n’a pas d’odeur ?

Source : RTVC

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